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vendredi 24 décembre 2010

Fêtes




24 décembre [1971]

Les fêtes de fin d'année m'ont toujours semblé un cauchemar et je crois bien qu'elles me le seront toujours.

Puis, mon corps rejoindra cette terre d'où il vient. La porte se refermera. Il pourrait ne rien rester. Oh ! mon Dieu, faites que l'oubli ne me prenne pas entièrement ! Faites qu'il reste de moi quelque chose ! Humblement, vous en qui je ne crois pas, je vous en prie. J'étais fait pour le bonheur ; j'en pressentais la saveur, le fumet. Mais il échappe toujours. Il existe bien de petites voluptés. J'en ai connu. Entre toutes, celles que propose le voyage, celles que laisse deviner un visage, celles que peuvent donner un poème, une musique, toutes choses qui ne ne sont que vent. Et cependant je sens en moi une irrépressible force de vivre. Seulement, parfois, il me semble, ou bien qu'il est trop tard, ou bien que renoncer serait confortable davantage.

Une fois de plus, la France me semble une prison. Tant de souvenirs de quais de gares, de ports, d'avions, de trains de nuit ; de rues inconnues et peu à peu apprivoisées me hantent ! Je ne puis être heureux que là où je ne suis pas.
Il y a deux ans, jour pour jour, heure pour heure, j'étais dans Lexington Avenue. Il neigeait. J'étais inconnu, à peine moi-même. Heureux ?

Bernard Delvaille Journal (1963 - 1977) La Table Ronde, 2001





 

Images : en haut, Michael Remaley (Site Flickr)

en bas, Pierre Andersson (Site Flickr)


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